Analyse de la pratique

Au sujet de l’analyse de la pratique, en tant que psychologue je m’appuie sur un cadre invariant, où durée des séances et rythmicité de celles-ci, assurent une permanence et une continuité de l’expérience indispensable, ce qui est un point fondamental s’agissant d’une institution accueillant des sujets qui ont eu pour certains des ratés de la continuité de l’expérience avec leur environnement premier.

Ce travail d’analyse a pour vocation d’être un espace de points d’appui identitaire pour les professionnels de votre institution autres que ceux, chaotiques ou complexes que peuvent leur renvoyer les sujets accueillis. Ilse présente également comme un temps de parole où les salariés partageant une réalité de terrain quotidienne, viennent dire dans cet espace où la confidentialité est garantie, ce qu’ils vivent ou éprouvent dans la rencontre éducative, ce qui permet au fil des séances de pouvoir associer, symboliser ou donner du sens à des situations souvent répétitives, énigmatiques et/ou confuses. Chaque groupe se veut donc être un espace d’analyse, dont la fonction est de modifier la trajectoire et la cible des éléments chaotiques, mortifères, violents ou répétitifs en provenance des résidents qu’il convient de chercher à dé-complexifier avec l’étayage de chacun des membres du groupe.

Evidemment, chacun des groupes constitués a une vie imaginaire et fantasmatique singulière liée aux salariés qui la constitue, le but étant que le fil associatif entre les membres permette que chacun se questionne à sa manière et à son rythme. Aussi, est requis un climat groupal général de « suffisante bienveillance » généré par un questionnement sur les pathologies et les symptômes que les résidents ne manquent de déployer au cœur de l’institution, tout autant que par un mouvement de reconnaissance mutuelle des difficultés rencontrées.

A partir donc de ce que déposent, disent, banalisent, minimisent, enjolivent les éducateurs tout autant qu’à partir de ce qu’ils dénient, projettent, clivent ou passent sous silence de la rencontre (bonne ou mauvaise) avec les résidents, ce travail doit pouvoir permettre au fil des séances de poursuivre l’élaboration autour des notions fondamentales en lien avec les problématiques du public accueilli, comme les questions (sans ordre de priorité) des pathologies spécifiques à ce public, du handicap physique et/ou mental, de l’autonomie, du vide, de l’accueil, de la cohabitation entre les personnes, de la séparation, du travail avec les familles, du « traitement » de la sexualité, de la scolarité, du rapport au travail, des addictions,  des médiations de loisirs ou créatives, ou encore du lien des résidents à la nourriture, à l’autorité, au cadre, à la loi… Ce travail permet en outre d’aborder plus en profondeur la vaste question du traumatisme et de sa conséquence : la répétition via la manifestation d’agir, de passages à l’acte, de violences, d’attaque du corps… rejouée dans la rencontre avec l’autre et les autres.

Si en dernière analyse, il revient aux différentes équipes de faire le bilan de ce que cet accompagnement leur apporte concrètement dans leur travail quotidien, concernant le psychologue que je suis, je soutiens qu’il permet et favorise la rencontre subjective avec résidents, lesquels ne manquent pas de répéter les attaques du contact et du lien. Il me semble également que le travail doit donner de la cohérence dans l’intervention auprès des personnes accueillies et permettre de centrer la pratique des différents participants autour des projets individuels de ceux-ci, de (re)préciser les places, les rôles, les statuts et les fonctions dans les espaces de chacun autour de leurs interventions.